Jeune d'Esther et journée pour les femmes "agounot"
(Queen Esther Holding The Evidence For Haman's Guilt, mosaic, 2002, by Lilian Broca)
Le 13 du mois d'Adar 5768 du
calendrier hébraïque tombe cette année le 20 mars 2008.
Dans le rituel juif, c'est un jour de jeune nommé "ta'anit Esther", jeûne d'Esther.
Il y a environ 26 siècles, selon la tradition juive, une femme, la reine Esther
appela les membres de sa communauté à jeûner afin de l'aider dans sa démarche
auprès du roi Assuérus auprès de qui elle intercédait pour empêcher le massacre
annoncé de tous les Juifs de son royaume... Cette solidarité participa à la
réussite de son entreprise. Esther demanda aussi aux Sages de son époque
d'inscrire cet évènement dans la Bible - il s'agit du Rouleau d'Esther -
et d'instituer un jour de réjouissance, la fête de Pourim, à l'issue du jeûne.
Initiative, courage, et solidarité sont quelques uns des mots clefs de cet
évènement. C’est pourquoi des associations de femmes juives de par le monde,
sous l’égide de l’ICAR, ont choisi ce jour du « jeûne d’Esther » pour
exprimer leur solidarité avec les femmes «agounot» - ces femmes à qui
les maris refusent de donner le «guet» c'est à dire le divorce
religieux. Car, en la matière, la loi juive se caractérise par une double
asymétrie. La première est que seuls les maris sont habilités à octroyer le
« guet », et durant cette période d’attente qui peut parfois durer
des années, les femmes sont « ancrées » dans leur statut de femme
mariée. Ce qui incombe, contrairement aux
hommes et c’est là la seconde asymétrie, qu’elles ne peuvent avoir d’autres
relations sous peine d’adultère et au risque que les enfants nés de ces relations
soient des enfants « illégitimes » (mamzérim).
Tout le long de l’histoire, les rabbins ont trouvé des solutions à de nombreux problèmes. Il est plus que temps maintenant qu’ils mettent un terme à des situations douloureuses qui touchent des milliers de femmes juives dans le monde (voir pour la France la conférence filmée sur mon enquête pour la WIZO). Ces solutions existent, le «prenuptial agrement » ou accord prenuptial pourrait être l’une d’entre elles (voir à ce sujet la conférence filmé « Guet et Agouna, quelle liberté pour la femme ? », la table ronde avec Maitre Annie Dreyfus, Janine Elkouby et Liliane Vana, organisée en février 07 au Centre Communautaire de Paris ainsi que mon dernier article dans l’Arche n° 598, mars 08). Il faut, pour que ces solutions se mettent en place, que d’une part, les communautés juives soient amplement sensibilisées et que d’autre part, les plus hautes autorités rabbiniques aient la volonté d’un consensus à ce sujet !
Je pense aujourd’hui à toutes ces femmes que je connais ou non et qui
attendent d’être délivrées, de pouvoir tourner la page et d’aller enfin chacune à leur vie délestée de ce poids.